NUMERIQUE EDUCATIF : ET APRES ?

05/05/2020

Arno Pons – Délégué général la Fondation Digital New Deal
Arno Pons – Délégué général Fondation Digital New Deal
Olivier Sichel - President Fondation Digital New Deal - DGA Caisse des Dépôts
Olivier Sichel – President Fondation Digital New Deal – DGA Caisse des Dépôts

En décembre dernier, nous publiions Préserver notre souveraineté éducative : soutenir l’EdTech française. Auteure du rapport, Marie-Christine Levet, avec le soutien de représentants actifs de la filière, s’y inquiétait de l’absence d’une stratégie claire et de long terme pour le numérique éducatif, alors même qu’un service public dédié avait été créé.

 

L’actualité exceptionnelle que nous vivons rend la question du numérique éducatif encore plus prégnante. Dans le rapport suscité, nous nous inquiétions de voir les solutions d’industriels du numérique s’imposer à l’école ; aujourd’hui, les usages de la crise montrent un recours indéniable à ces solutions dont nous ne maîtrisons, peu ou prou, rien.

Une crise qui touche le système éducatif tout entier

La crise sanitaire actuelle, qui a conduit à la fermeture totale des écoles et des universités françaises, pose des difficultés pour organiser la continuité pédagogique. Nous participons tous, d’une manière ou d’une autre, à la permanence de l’enseignement en ce temps de crise, au premier rang desquels les enseignants, mais également les élèves et les parents – tout le monde met la main à la pâte !

Les disparités sont nombreuses et se retrouvent chez les familles, pas toutes égales face à la crise. Certains ne possèdent pas du tout d’équipements, d’autres pas assez pour tous les membres de la fratrie. Certains ne disposent d’une connexion assez puissante, d’autres ne savent pas nécessairement utiliser les outils.

Presque du jour au lendemain, les professeurs se sont retrouvés face à l’impératif de continuité pédagogique, toutefois sans toujours disposer des moyens adéquats pour sereinement – ou plutôt efficacement – l’organiser. Plateforme du CNED, espaces numériques de travail ou encore utilisation d’outils numériques grand public, les enseignants jonglent avec habileté – mais non sans difficultés – avec les outils qui sont à leur disposition. Le manque de formation crée des inégalités face à l’enseignement : quand certains professeurs regorgent d’idées inventives pour continuer à faire classe, d’autres sont décontenancés et tâtonnent.

Si la crise, cependant, permet le développement d’usages numériques éducatifs, ce sont bien des outils d’industriels du numérique, de surcroît étrangers, qui s’imposent massivement. Des groupes Facebook et WhatsApp sont mis en place, des classes virtuelles sont organisées via Skype, Zoom ou Teams ; ces outils sont majoritairement utilisés à des fins communicationnelles. Pourtant, mettre le numérique à contribution de l’apprentissage suppose d’y avoir été formé : choix de l’outil, utilisation de celui-ci, gestion de la relation avec les élèves (et les parents) ou encore gestion du temps. D’autant plus que les outils institutionnels existants ne permettent pas d’assurer parfaitement la continuité pédagogique.

La filière du numérique éducatif en ces temps de de crise

Cette expérience “grandeur nature” du numérique éducatif, dans un contexte fortement contraint, en a aussi révélé les limites actuelles : des infrastructures fragiles, des enseignants plus ou moins acculturés, des taux d’équipements disparates en fonction des familles et des territoires, un recours massif à des solutions technologiques étrangères, plus ou moins respectueuses de la protection des données personnelles… Il en résulte un constat en demi-teinte : si le numérique éducatif est indispensable à la continuité pédagogique, les conditions de son déploiement ne sont, à ce jour, pas réunies.

EdTech France a rapidement mis en place une plateforme permettant d’accéder gratuitement et sans conditions à un ensemble de ressources numériques jusqu’à la fin du confinement, pour les apprenants et les formateurs. Utilisés de manière empirique par des professeurs inégalement formés, ces outils ne répondent pas à une logique de crise. Si certains outils ont prouvé leur utilité, d’autres ne satisferont pas leurs utilisateurs.

Si la période actuelle permet à la filière d’être mise en lumière – c’est indéniable – le secteur ne bénéficie pas d’un effet d’aubaine complet. D’une part, certaines entreprises de la filière sont de petites structures et ne sont, de fait, pas dimensionnées pour répondre à une sollicitation accrue (et imprévue) ; elles se retrouvent face à leurs limites et ne peuvent passer à l’échelle. D’autre part, certaines ne survivront pas à la crise ; l’absence totale d’activité les conduiront à disparaître, comme c’est le cas pour beaucoup d’entreprises dans le monde, tous secteurs confondus.

Les acteurs du secteur plaident pour une transformation profonde des apprentissages à l’ère numérique. Les solutions du secteur sont diverses : elles ne se limitent pas à l’équipement et ne consistent pas uniquement à permettre une « classe virtuelle ». Elles s’adressent aux parents, aux élèves et aux enseignants, ainsi qu’aux établissements du primaire, du collège ou du lycée. Elles permettent d’assurer un enseignement à distance, de produire des contenus pédagogiques, de passer des examens à distance, d’apprendre des langues, d’accéder à de nombreuses ressources pédagogiques ou encore de maîtriser le numérique.

Après la crise ?

En France, la question de l’investissement public se posera très certainement. A l’instar du marché de l’édition scolaire, dont le chiffre d’affaires s’élève à près de 300 millions d’euros, quand le secteur du numérique éducatif sera-t-il à son tour soutenu ? Quand permettrons-nous réellement à nos professeurs d’utiliser, s’ils le souhaitent, des dispositifs numériques de qualité tout autant que des manuels scolaires de qualité ?

Le préalable au développement d’usages numériques est la formation. L’ergonomie ou l’expérience utilisateur d’un outil numérique ne doivent pas se substituer à la formation de ceux qui l’utilisent. La formation initiale et continue doit permettre aux professeurs, d’une part, de maîtriser l’outil, et d’autre part, d’être en mesure de développer des méthodes pédagogiques et d’enseignements avec lui. La « débrouillardise », qui caractérise les usages actuels du numérique par les enseignants – quel autre choix ont-ils ? – corrobore la nécessité de former massivement.

La promesse pédagogique faite par les outils numériques doit être demain encore plus justifiée qu’aujourd’hui. Trois dimensions semblent importantes pour accroître leur légitimité. Premièrement, il faut être capable de prouver que le dispositif utilisé est approprié et qu’il correspond aux buts de l’apprentissage. Il convient de s’assurer, ensuite, que les formateurs et les apprenants soient capables de l’utiliser – ce point rejoint l’impératif de formation. Et, enfin, un travail d’éducation et de pédagogie auprès des professeurs, des élèves, des parents et des pouvoirs publics est nécessaire pour que ces solutions soient acceptées. C’est ici que l’Etat doit jouer son rôle de régulateur en favorisant la rencontre entre professeurs et entrepreneurs edtech, afin d’encore mieux faire correspondre offre et besoin.

En outre, la crise confère au numérique éducatif un caractère résolument politique ; utiliser un outil d’un industriel étranger du numérique, qui ne stocke par exemple pas ses données sur le territoire, n’équivaut pas à utiliser une solution locale. La question du modèle économique doit nous interroger sur la finalité des différentes entités qui proposent des outils numériques pour l’éducation. Une entreprise française spécialiste de l’éducation, dont les revenus reposent essentiellement sur les abonnements, est-elle équivalente à une entreprise étrangère, multi-servicielle, dont les revenus reposent sur l’exploitation de données ?

Après le report du Forum International du Numérique pour l’Education (In Fine) à 2021, que faut-il espérer des Etats généraux du numérique éducatif, annoncé par Jean-Michel Blanquer pour la rentrée 2020 ? Nous l’espérons, des décisions à la hauteur des carences que la crise a révélées.

ÉDITO

LE NUMÉRIQUE AU SERVICE D’UN FUTUR DURABLE

« La “maison brûle”, ne laissons pas le thermomètre entre quelques mains… » Afin d’atteindre les Objectifs de Développement Durable, le think-tank Digital New Deal publie un nouveau rapport proposant que les données ESG, privatisées par 6 grandes compagnies américaines de notations, soient accessibles à tous via un commun numérique.

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L’Open Source, chance unique de créer une IA de confiance européenne

L’avenir de la France se dessine aussi dans les lignes de code et les algorithmes. Face à la domination des géants américains et chinois en matière d’intelligence artificielle (IA), l’Europe, et la France en particulier, a une carte cruciale à jouer. Il est temps pour la France de prendre les devants et de se doter d’une IA de confiance pour renforcer sa souveraineté numérique et soutenir ses acteurs nationaux.

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Définir les normes, pas les subir.

Certains acteurs politiques et industriels critiquent la normalisation, allant pour les Britanniques jusqu’à justifier du Brexit du fait des contraintes normatives Européennes et du besoin de souveraineté. C’est oublier un peu rapidement que la normalisation est d’une part essentielle à la construction de la confiance et aux échanges économiques dans les pays modernes, et d’autre part que la normalisation est le résultat d’un consensus auquel chaque acteur peut contribuer. De fait, la normalisation n’est pas un objet éthéré qui tombe du ciel, mais le résultat d’un processus ouvert à toutes les organisations.

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La souveraineté numérique n’existe pas

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POINT DE CLOUD SOUVERAIN SANS DATA DE CONFIANCE

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Pour une IA des Lumières européenne

L’Intelligence Artificielle (IA) est au cœur des préoccupations et des fantasmes, sa simple définition constitue un défi en soi. Il est donc crucial que nous puissions y contribuer, afin de pouvoir offrir au monde une vision européenne, c’est-à-dire humaniste

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RGPD, quatre ans après, enfin l’acte II

A mesure que se développent les outils numériques, l’ampleur de la collecte et du traitement des données personnelles ne cesse d’augmenter. Chez certains, cela a nourri des craintes d’intrusion dans la vie privée, par les États ou des acteurs privés, mais aussi de discrimination, de surveillance ou de manipulation. La réponse réglementaire européenne, le Règlement Général pour la Protection des Données (RGPD), visant à garantir tant la protection des données que leur libre circulation, a été globalement considérée comme salutaire dans le monde entier.

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SERVICE PUBLIC AUGMENTÉ, BÉNÉFICE COLLATÉRAL DU COVID

La crise sanitaire que nous traversons aura eu le mérite de faire émerger des solutions, des talents, qui ont pu exprimer leur potentiel lors de ces circonstances exceptionnelles. Comme en temps de guerre, des héros du quotidien issus de la société civile ont fait la fierté de nos concitoyens. Des infirmières que l’on applaudit, des caissières que l’on remercie, mais aussi… des geeks que l’on gratifie. En faisant chevalier de l’ordre national du Mérite le jeune Guillaume Rozier pour la création CovidTracker et Vitemadose, l’Etat prend acte de sa mue en institutionnalisant la participation des citoyens à la défense de l’intérêt général dont il n’a plus le monopole.

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« Cloud de confiance » : cuisine et dépendance

Les annonces gouvernementales en début d'année sur le « Cloud souverain » semblaient pourtant frappées du bon sens, et ont été d'ailleurs globalement bien accueillies. À un détail près peut-être, mais pas des moindres : la question des licences aux GAFAM. Beaucoup en effet considèrent que c'était ouvrir la porte en grand aux Big techs dont ils étaient supposés nous protéger. Les fervents défenseurs de notre indépendance technologique, économique et géopolitique, dont notre think-tank Digital New Deal fait partie, sont en droit de s'interroger.

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Plateformes numériques : encore un effort pour être responsables !

Le président Trump chassé du réseau. La petite Mila pourchassée sur la toile. « La naissance du monde », célèbre toile de Courbet, interdite ! Chaque jour son lot de nouvelles étonnantes ou révoltantes qui montrent qu’il y a « quelque chose de pourri au royaume » des plateformes.

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Pour un Education Data Hub au service de l’ouverture des données éducatives

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Monopole de l’Apple Store : la grogne monte

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« 1 JEUNE 1 PME » : L’EMPLOI DES JEUNES POUR ACCELERER LA TRANSITION NUMERIQUE DES TPE-PME FRANCAISES

L’instauration d’une dynamique nouvelle entre les filières du numérique de l’enseignement supérieur et les TPE-PME pourrait contribuer positivement à la transition numérique des entreprises, en même temps qu’à l’emploi des jeunes.

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UNE GOUVERNANCE POUR LA CIRCULATION DES DONNEES PERSONNELLES

L'article 20 du Règlement général sur la protection des données, qui consacre un droit à la portabilité des données, constitue une des clés pour mettre sur pied une architecture de circulation des données personnelles plus vertueuse que celle qu'ont mise en place les Big Tech.

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DATA : LA SEPARATION DES POUVOIRS POUR CONTRER LA MONARCHIE DES GAFAM

Notre dernière publication propose un modèle concret de partage des données personnelles, centré sur l’individu, offrant ainsi un modus operandi commun aux entreprises et collectivités afin qu’elles coopèrent et innovent.

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QUEL NOUVEAU SOUFFLE POUR L’ETAT PLATEFORME ?

Le besoin d’État s’accompagne d’une demande de transformation des moyens de l’action publique pour en assurer la réactivité, la résilience et la proximité avec les citoyens et les territoires.

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BIG TECH : L’HEURE EST A LA RESPONSABILITE

Alors qu’Internet est devenu l’espace central de la circulation de l’information, il devient crucial d’imposer aux géants du numérique, principaux acteurs d’échanges, un régime de responsabilité à la hauteur de l’influence qu’ils détiennent.

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DEFENDRE NOTRE EXCEPTION EDUCATIVE A L’ERE NUMERIQUE

L’impact systémique du numérique sur la société doit pousser l’Education nationale à sortir de son immobilité, à amorcer une mutabilité pérenne de l’institution scolaire.

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BIG TECH : L’HEURE EST A LA REGULATION PAR LA MULTITUDE

Face à la concentration inédite du pouvoir sur Internet dans les mains d’un petit nombre d’entreprises identifiées, quelle est la nature du contre-pouvoir à adopter ?

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SORTONS DE NOTRE PARALYSIE EN DEMYSTIFIANT LES GEANTS DU NET !

La dépendance à deux systèmes d’exploitation (OS), MS/DOS Windows et Unix/Linux constitue la racine commune des difficultés et effets secondaires négatifs de notre développement technologique actuel.

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L’ADMINISTRATION, LA NOUVELLE AVENTURE ENTREPRENEURIALE ?

Aujourd’hui, l’innovation technologique profite majoritairement aux intérêts privés, et les innovations sociales – aussi prometteuses soient elles – peinent à atteindre une envergure à la hauteur des enjeux de société.

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